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Le blog de cepheides

Le blog de cepheides

articles de vulgarisation en astronomie et sur la théorie de l'Évolution

Publié le par Céphéides
Publié dans : #paléontologie

 

allosaurus

   

 

     Cent-cinquante millions d’années, c’est la durée de la domination des dinosaures sur notre planète. Un chiffre difficile à concevoir… À titre de comparaison, l’existence de l’Homme civilisé ne court que sur quelques milliers d’années tandis que notre propre espèce, Homo sapiens, n’apparaît qu’il y a environ 300 000 ans (une durée 500 fois moins étendue que la présence des grands sauriens sur Terre).

 

     Il y a quelques mois, un lecteur m’a fait la remarque qu’un certain nombre d’articles du blog traitait des dinosaures mais sous la forme de sujets épars et que, en conséquence, il était parfois difficile de se faire une idée précise de la chronologie de leur présence. Nous allons donc essayer aujourd’hui de situer brièvement ce si long règne (des renvois aux articles connexes précédemment écrits seront signalés chaque fois que possible).

 

 

Avant les dinosaures

 

     Les dinosaures n’ont certainement pas été les premiers animaux à dominer la Terre. Se terminant au Permien, le paléozoïque (anciennement ère primaire) s’est étendu sur presque 300 millions d’années : c’est dire qu’il a pu s’en passer des choses tant d’un point de vue géologique (dérive des continents) que de celui des êtres vivants ! Quoi qu’il en soit, c’est lors de cette dernière période, le Permien, que la vie sur Terre va subir une extraordinaire catastrophe : la disparition de 95% des espèces marines et de 70% des espèces terrestres.

 

     Tout avait pourtant bien commencé avec, au début du paléozoïque, vers -540 millions d’années (MA), à une époque appelée le Cambrien, une fantastique diversification des espèces vivantes et notamment l’apparition d’animaux multicellulaires dotés de parties dures. Même si de nombreux fossiles antérieurs ont aujourd’hui été mis au jour, il n’en reste pas moins que cette apparition de tant d’espèces en seulement quelques millions d’années reste difficile à expliquer. Près de 290 millions d’années plus tard, à la fin du Permien, la vie est toujours là, différente bien entendu.

 

    Il n’existe alors qu’un seul supercontinent, la Pangée, principalement fixé dans l’hémisphère sud, entouré par un immense océan, la Panthalassa. Sur les terres, le climat est aride, les

la Pangée au Permien

glaces ayant quasiment disparu. Les plantes sont essentiellement représentées par des fougères et des gymnospermes et, déjà, vers la fin de la période, les premiers arbres, des conifères.

 

     Sur terre dominent les thérapsidés anciennement appelés reptiles mammaliens, lointains ancêtres des mammifères. C’est à cette époque qu’apparaît la thermorégulation comme en témoignent la présence de voiles dorsaux chez certaines espèces

pelycosaure (dimetrodon)

(pelycosaures). On trouve également des amphibiens, des arthropodes (insectes, arachnides, scorpions, etc.) et les ancêtres des dinosaures, encore relégués à un rang inférieur. Dans la mer, la vie grouille aussi sous la forme de céphalopodes (nautiles), d’arthropodes (crustacés), de brachiopodes (coquillages bivalves), des coraux (très différents des coraux actuels), et bien d’autres espèces encore.

 

      Durant des millions d’années, ces animaux ont vécu en bon équilibre jusqu’à l’extinction de masse de – 252 MA. En effet, brutalement, une fantastique éruption volcanique (les trapps de Sibérie) va déposer sa lave durant près d’un million d’années sur 4 km d’épaisseur et une surface presque aussi grande que celle de la France. Inutile de préciser que, sur un continent unique rappelons-le, les dégâts seront considérables, notamment pour la faune marine (effet de serre intense, variation de la salinité océane, pluies acides, etc.).

 

       C’est de ce bouleversement imprévu que les dinosaures vont profiter.

 

 

Articles connexes

la Terre boule de neige 

les insectes géants du carbonifère

les extinctions de masse 

l'explosion cambrienne 

le schiste de Burgess

la grande extinction du Permien

 

 

L’aube des dinosaures

 

     On sait bien que le malheur des uns fait le bonheur des autres : l’extinction permienne va permettre l’apparition de nouvelles espèces qui vont pouvoir conquérir les niches écologiques laissées vacantes. En effet, 20 millions d’années après la

Herrerasaurus

catastrophe (ce qui est peu en termes géologiques), les dinosaures avaient commencé à évoluer et à se diversifier. On voit alors apparaître les premiers théropodes (Herrerasaurus), lignée qui aboutira bien plus tard au célèbre Tyrannosaure rex mais également les ornithischiens (Pisanosaurus), lignée qui donnera par la suite les Triceratops.

 

     Les « ancêtres » des dinosaures faisaient partie d’un groupe, les archosauriens, ayant survécu à l’extinction, groupe qui s’est rapidement scindé en deux : d’un côté, les pseudosuschiens dont descendent nos actuels crocodiles et d’autre part, les métatarsaliens dont sont issus les dinosaures. Les pseudosuschiens seront les animaux dominants sur Terre au début du mésozoïque (anciennement ère secondaire), c'est-à-dire au Trias. Ils sont alors les plus nombreux et les plus diversifiés, regroupant des centaines d’espèces différentes plus ou moins crocodiliennes au sein desquelles certains spécimens pouvaient atteindre la taille d’un autobus. Les métatarsaliens avaient donc intérêt à faire profil bas

 

     On comprend donc pourquoi les premiers dinosaures étaient petits et discrets. Vers dix millions d’années après l’extinction de masse, les scientifiques ont mis au jour le fossile d’une sorte de petit reptile bipède d’un maximum d’un mètre de longueur

Eoraptor

et pesant au plus une cinquantaine de kg. Bipède et donc forcément rapide, l’Eoraptor devait être plutôt intelligent et possédait un métabolisme élevé. Voilà une des raisons qui expliquent le succès ultérieur des grands sauriens : pour éviter la compétition avec plus fort qu’eux, ils ont rapetissés ! De nombreux petits dinosaures ont par la suite été identifiés comme vivant à cette époque et ils étaient minuscules. Kongonaphon kely, par exemple, proche de l’ancêtre commun des ptérosaures et des dinosaures, ne mesurait pas plus de 10 cm…

Kangonaphon kely

Certains scientifiques avancent même l’idée qu’entre les premiers archosauriens et l’ancêtre commun que nous venons d’évoquer, la taille des individus a été divisée par deux. D’autres, à l’exemple des mammifères, utiliseront bien plus tard ce subterfuge adaptatif.

 

Articles connexes

spéciations et évolution des espèces

l’Évolution est-elle irréversible ?

hasard, contingence et nécessité 

 

 

L’explosion radiative des dinosaures

 

     On entend par explosion radiative l’évolution rapide, à partir d’un ancêtre commun, d’un ensemble d’espèces caractérisées par une grande diversité écologique. En d’autres termes, c’est la diffusion gagnante d’une famille d’espèces à l’ensemble de la Terre : à la fin du Crétacé, dernière partie du Mésozoïque (anciennement ère secondaire), les dinosaures représentaient à peu près 95% de la biomasse des vertébrés et dominaient pratiquement toutes les niches écologiques ! Comment un succès aussi considérable a-t-il pu se produire ?

 

    Outre la disparition de leurs rivaux anéantis par l’extinction permienne, plusieurs explications ont été avancées par les scientifiques mais la principale d’entre elles est l’apparition chez ces animaux de la bipédie. En effet, les reptiles ne possédaient jusque là que des membres latéraux qui permettaient certes le déplacement mais avec le gros inconvénient d’un abdomen et d’une queue traînant sur le sol d’où un ralentissement évident. Avec, de plus, l’obligation de voir une partie des efforts se diluer dans une reptation souvent poussive. Rien de cela avec les

Thecodontosaurus antiquus, un des premiers bipèdes

nouveaux intervenants qui, grâce à la bipédie, acquièrent quant à eux l’association d’une bonne stabilité corporelle et des pas plus longs leur conférant une locomotion plus fluide, tant du point de vue de la prédation que de la fuite éventuelle. Suite à une probable mutation conférant à ses premiers possesseurs cet avantage évolutif, la sélection naturelle a donc fait le reste avec le succès qu’on connaît.

 

      En quelques millions d’années, voilà les grands sauriens maîtres du monde. Très vite divisés en théropodes carnivores et en sauropodes herbivores, les espèces de dinosaures se diversifient et se multiplient avec conservation de la bipédie chez les carnivores mais retour à la quadrupédie pour la plupart des herbivores qui restent ainsi « plus proches du sol ».

 

      Pour mieux se défendre contre la prédation, les sauropodes vont petit à petit en venir à développer leur corpulence dans un voyage effrénée vers le gigantisme (ce qui obligera dans une espèce de course sans fin les théropodes à en faire de même). Au fil de dizaines de millions d’années d’évolution, on en arrivera à

supersaurus

voir apparaître des animaux tellement grands qu’aucun prédateur ne pourra les attaquer : par exemple, un supersaurus (ayant vécu au Jurassique supérieur entre – 157 et – 145 MA) mesurait environ 40 m de long (soit la taille d’un immeuble de dix étages) pour un poids de 50 tonnes. Il était doté d’un très long cou et, pour assurer l’équilibre de l’ensemble, également affublé d’une queue non moins longue (susceptible de surcroît de fouetter les indésirables) ; campé sur ses quatre énormes pattes semblables aux piliers d’un temple antique, il était hors de portée d’un allosaurus, prédateur de cette époque, qui ne mesurait « que » dix mètres de long pour un poids de 2,3 tonnes (voir l'image en en-tête). Ce dernier n’avait qu’un seul moyen pour manger du supersaurus : écarter un jeune du troupeau ou tomber sur un cadavre !

 

    Ajoutons qu’une autre explication à la conquête du monde par les grands sauriens réside dans la dérive des continents qui va progressivement fragmenter la Pangée, les éparpillant au point de les faire évoluer différemment avant de les replacer en compétition lors d’un nouveau rapprochement des terres, cette histoire se déroulant au fil de dizaines de millions d’années.

 

Articles connexes

le rythme de l’évolution des espèces 

la dérive des continents ou tectonique des plaques

la tentation la tentation du gigantisme

 

 

Un long règne indiscuté

 

     Durant ces cent-cinquante millions d’années de domination inconditionnelle, l’Évolution a permis l’apparition d’un grand nombre d’espèces de dinosaures : les scientifiques en ont identifié à ce jour un bon millier mais il en exista certainement beaucoup plus. Ce sont des millions de générations de grands sauriens qui se sont succédés en se transformant peu à peu mais en respectant toujours la distinction théropodes/sauropodes. La durée de vie de chaque individu était très certainement variable selon la corpulence : plus un animal était petit, plus son espérance de vie était faible. Les scientifiques estiment, par exemple, la durée de vie d’un gros dinosaure herbivore à environ 80 années alors que les petits ne pouvaient espérer que quelques années d’existence. Il faut également tenir compte du fait que, dans la Nature et cela même aujourd’hui, un animal sauvage a peu de chance de mourir effectivement de vieillesse…

 

Tyrannosaure tex, un succès en partie dû à l'endothermie

 

     Un autre élément permet d’expliquer la longue domination de ces animaux : contrairement à ce que l’on avait longtemps pensé, les paléontologues ont pu récemment démontrer que la majorité des dinosaures étaient endothermes, c’est-à-dire qu’ils avaient le sang chaud (ou en tout cas tiède) ce qui leur permettait de mieux s’adapter aux changements de température et d’être actifs toute l’année. Tous les dinosaures ? Non, certaines espèces étaient restées (ou redevenues) ectodermes à la façon des reptiles : c’est par exemple le cas des Triceratops, des Hadrosaures (les fameux dinosaures à bec de canard) ou encore des Stégosaures mais ces espèces étaient certainement minoritaires.

 

     En somme, les dinosaures étaient parfaitement adaptés à leur milieu et l’on peut se demander quelle aurait été leur évolution ultérieure : l’accession à une forme d’intelligence pseudo-humaine est peu probable puisqu’ils avaient eu 150 millions d’années pour l’acquérir. On peut en revanche penser qu’ils seraient encore les maîtres de notre planète si le hasard qui leur avait permis d’apparaître à la fin du Permien ne s’était pas retourné contre eux à la fin du Crétacé.

 

Articles connexes

l’empire des dinosaures

le rythme de l’évolution des espèces

 

Le crépuscule des dinosaures

 

     La météorite géante qui s’écrasa dans le golfe du Mexique aurait très bien pu éviter la Terre si sa trajectoire avait été presque imperceptiblement différente. On sait que Jupiter, la planète géante « proche » de la Terre, lui sert en quelque sorte de bouclier et, parmi les candidats météorites mortels, peu lui échappent. Avec quelques exceptions néanmoins… Il est ainsi vraisemblable que de nombreux astéroïdes mortifères ont dû frôler notre planète durant un laps de temps aussi étendu : cent cinquante millions d’années ! Mais il suffisait d’un seul : en l’occurrence un morceau de roche de 10 km de diamètre arrivant sur le sol à la vitesse de 11 km/seconde pour voir la terreur et la mort se répandre brutalement.

 

     Nous évoquions précédemment le gigantisme des dinosaures, notamment des sauropodes. Ceux-là, notamment, devaient s’alimenter quotidiennement en grande quantité. Les animaux qui n’ont pas été anéanti au moment de l’impact ou par les immenses feux de forêt, raz-de-marée et retombées des projections, se sont retrouvés face à un cataclysme alimentaire : l’hiver dit « nucléaire » provoqué par la stagnation en haute altitude des cendres diverses a fini par détruire, faute de photosynthèse, l’essentiel de la végétation restante. On estime qu’il fallut plusieurs mois pour que ces cendres retombent (le plus souvent sous forme de pluies acides) et plus encore pour recréer un semblant de végétation. Bien trop long pour nos grands sauriens…

 

    La conclusion s’impose d’elle-même ; un vide immense ayant été ouvert et puisque l’on sait que la Vie trouve toujours son chemin, ce sont d’autres animaux qui allaient profiter de l’aubaine en un scénario inversé du Permien : les mammifères jusque là restés fort discret…

 

     En somme, on peut associer la disparition des grands sauriens à un simple

premiers mammifères
premiers mammifères dominant... au hasard d'un météorite

hasard. Un hasard qui profita aux mammifères dont nous semblons être aujourd’hui la forme la plus accomplie, du moins en ce qui concerne l’intellect. On peut toutefois se demander si cette domination, si rapide en termes géologiques, ne risque pas de s’effacer tout aussi rapidement si l’on songe à la transformation radicale que fait subir Homo sapiens à notre planète : toutefois, si cela se produit ce ne sera assurément pas du fait du hasard…

 

Articles connexes

la disparition des dinosaures

des dinosaures de jadis aux oiseaux d'aujourd'hui ?

 

 

 

Addendum

Il est fréquemment fait allusion dans le corps de l’article à des « durées de temps » qu’il semble parfois difficile de se représenter : afin de mieux apprécier la « taille » des différentes époques, on trouvera ci-après une chronologie de la Terre ramenée à une année.

 

* 1er janvier, minuit : naissance de la Terre (- 4,6 milliards d’années)

* 5 mars : premières traces de vie (-3,8 milliards d’années)

* 30 novembre : premiers animaux hors de l’eau

* 16 décembre : apparition des dinosaures

* 26 décembre : disparition des dinosaures

* 31 décembre, 8h : premiers hominidés (- 10 MA)

* 31 décembre, 23h58 : grotte de Lascaux (- 20 000ans)

* 31 décembre, 1er coup de minuit, apogée de l’Empire romain

* 31 décembre, 12ème coup de minuit : aujourd’hui

 

Conclusion : les dinosaures dominèrent la planète durant environ une douzaine de jours et l’Homme moderne la domine depuis… une trentaine de secondes !

 

 

 

Sources

 

* Encyclopaedia Brittanica

* https://lewebpedagogique.com

* Wikipedia France :  fr.wikipedia.org/

* Science & Vie, février 2021

 

Images :

1. allosaurus (sourcesfineartamerica.com)

2. pelycosaure (sources : dinosauria.com)

3. Herrerasaurus (sources : abcdino.com))

4. Euraptor (sources : dkfindout.com)

5. Kangonaphon kely (sources : wikipedia)

6. Thecodontosaurus (sources : pixels.com)

7. Supersaurus (sources : pinterest.com)

8. Tyrannosaure rex (sources : www.futura-sciences.com)

9. premiers mammifères (sources : 24matins.fr)

 

 

 

 


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mise à jour : 6 septembre 2023

Commenter cet article
H
Ayant commenté un autre sujet (astronomie), j'ai été attiré par ce sujet sur les dinosaures et je dois vous dire que ce texte est lui aussi passionnant : j'ai notamment apprécié votre image d'une réduction de l'existence de la Terre à une année qui permet effectivement de bien relativiser les choses. Je vous remercie de nous faire profiter de tous ces textes si intéressants et vous souhaite de continuer longtemps...
Répondre
C
Merci pour vos encouragements... et votre fidélité !
L
Article passionnant qui donne un aperçu facilement compréhensible de la durée de la vie sur Terre. Je reste fascinée par l'arrogance humaine qui remet en cause pour son propre confort l'harmonie de la Nature : j'ai l'impression que cela va mal finir !
Répondre
C
Hélas, comme vous, je suis assez pessimiste sur l'avenir de l'Humanité ! En tout cas, merci pour vos encouragements.

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