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Le blog de cepheides

Le blog de cepheides

articles de vulgarisation en astronomie et sur la théorie de l'Évolution

Publié le par Céphéides
Publié dans : #astronomie
paradoxe de Fermi
Enrico Fermi (1901-1954) prix Nobel de physique 1938

 

Depuis les années 1950 et l’avalanche de « soucoupes volantes » aperçues à cette époque, bien des gens se posaient cette angoissante question : « sommes-nous seuls dans l’Univers et, si non, pourquoi n’a-t’on pas encore rencontré d’extraterrestres ? ».

Les scientifiques, interrogés, ne savaient pas vraiment quoi répondre et certains n’hésitaient pas à les soupçonner de dissimuler « la » vérité dans une approche qu’on ne qualifiait pas encore de complotiste. Pourtant, de nombreux astronomes et/ou astrophysiciens réputés se posaient effectivement la question comme en témoigne le compte-rendu d’un célèbre repas.

 

 

Le paradoxe de Fermi

 

     Durant l’été 1950, les physiciens Emil Konopinski, Herbert York, Edward Teller et Enrico Fermi déjeunaient dans la cafeteria du Laboratoire National de Los Alamos, un laboratoire multidisciplinaire situé aux USA, dans l’état du Nouveau-Mexique. Enrico Fermi, prix Nobel de physique en 1938, avait émigré aux USA en 1939 et participait avec ses collègues au projet « Manhattan » qui devait aboutir à la mise au point de la première bombe atomique. Dans le feu de la conversation, il prononça ce jour là une phrase à la fois provocante et pourtant sérieuse : « Mais où sont-ils donc, tout ces extraterrestres ? ». La question était tout à fait

voie lactée
Voie lactée : l'univers est certes immense mais où sont-ils ?

d’actualité et intéressait beaucoup de gens qui croyaient voir des soucoupes volantes un peu partout. C’est cette phrase qui est à l’origine de ce qu’il est aujourd’hui convenu d’appeler le paradoxe de Fermi : on devrait « les » voir mais on ne « les » voit pas...

 

Ce n’est qu’en 1966 que la question de Fermi fut redécouverte par l’astronome américain Carl Sagan qui pensa alors qu’une civilisation assez ancienne pourrait avoir le temps de coloniser entièrement la Galaxie et serait d’ailleurs déjà présente sur Terre mais son (court) article resta sans lendemain et le paradoxe de Fermi retomba dans l’oubli… jusqu’en 1975 où deux scientifiques, Michael Hart et David Viewing, reprirent les arguments des uns et des autres pour arriver à la conclusion que les civilisations extraterrestres n’existent pas. Conclusion définitive ? Certainement pas.

Le paradoxe de Fermi s’appuie donc sur deux postulats contradictoires :

 

a) La vie sur Terre n’est certainement pas exceptionnelle et de nombreuses autres formes de vie doivent exister dans un univers aussi vaste (des milliards et des milliards d’étoiles et de planètes rien que pour la seule Voie lactée),

 

b) Il n’existe aucune preuve réelle de la venue présente ou passée d’extraterrestres sur Terre et, depuis les innombrables sondes envoyées dans l’espace explorer les autres planètes du système solaire, on sait qu’il en est de même pour elles.

 

extraterrestres
leur existence n'a jamais été prouvée

 

La deuxième branche du paradoxe ne souffre guère de débats et c’est plutôt la première (a) qui autorise une discussion plus poussée.

 

On peut faire la constatation suivante : savoir si une civilisation extraterrestre avancée a eu le temps de venir nous rendre visite relève d’un calcul assez simple. En effet, la Voie lactée mesure approximativement 100 000 années-lumière et elle s’est formée avec l’Univers il y a un peu plus de 13 milliards d’années. Si l’on suppose qu’une civilisation extraterrestre a trouvé les moyens de se déplacer à, disons, 300 km/seconde, soit un millième de la vitesse de la lumière ce qui est du domaine du possible, et qu’elle soit apparue il y a cinq milliards d’années, elle aurait déjà eu la possibilité de venir sur Terre et ce de quelque partie de la Galaxie qu’elle provienne. Ajoutons que nous évoquons ici une seule civilisation mais que si la vie n’est pas si exceptionnelle, c’est un grand nombre d’extraterrestres que nous aurions dû déjà rencontrer. Dès lors, comment expliquer ce paradoxe ?

 

 

Quelles solutions au paradoxe de Fermi ?

 

De nombreux scientifiques et/ou auteurs de science-fiction se sont penchés sur le problème et si les hypothèses sont nombreuses (et parfois farfelues), il est difficile de choisir la plus crédible d’autant qu’il est parfaitement possible que certaines soient associées. Il est donc tout à fait impossible d’être exhaustif mais les principales théories peuvent être réunies selon quatre groupes principaux :

 

 

1. Les civilisations extraterrestres n’existent pas

 

La vie sur Terre est un phénomène unique (ou si rare que cela revient au même) car il dépend de la conjonction de nombreux facteurs (voir le sujet : vie extraterrestre) et l’absence de l’un d’entre eux compromettrait son apparition. 0n peut néanmoins opposer comme argument que cette hypothèse ne concerne que la vie sur Terre, la seule que nous connaissons, et que d’autres formes de vie ont parfaitement pu se développer sous d’autres conditions physicochimiques…

 

Nous venons d’évoquer la vie mais la vie, ce n’est pas forcément l’intelligence et on peut dès lors parfaitement imaginer que certaines planètes plus ou moins lointaines renferment une forme de vie (bactéries, virus, autre chose d’assez primitif ?) et nous ne pouvons évidemment pas communiquer avec elle. Ici, c’est l’intelligence qui est rare.

 

Il existe par ailleurs bien des raisons pour empêcher l’apparition de la vie sur une planète.

 

En 2021, le spécialiste des exoplanètes David Kipping a avancé une hypothèse qu’il a baptisé le paradoxe du ciel rouge en partant de la constatation évidente que l’immense majorité des étoiles sont – nous l’avons souvent souligné – des naines rouges qui, de plus, vivent dix fois plus longtemps que les naines jaunes comme le Soleil. Un simple calcul permet donc d’établir que l’apparition de la vie autour d’une naine jaune est cent fois moins probable. La vie sur Terre est-elle si particulière qu’elle invalide les statistiques ?

 

Nous venons de parler chiffres comme si ces deux types d’étoiles étaient strictement comparables ce qui n’est, en réalité, pas le cas. D’abord, nous le savons aujourd’hui, une naine rouge possède rarement de géantes gazeuses dans son cortège de planètes. Or ces planètes géantes sont « protectrices », empêchant les météorites trop volumineuses de passer leur « barrage ». C’est bien le cas dans le système solaire où Jupiter et Saturne ont certainement limité

irrégularités des étoiles naines rouges
les naines rouges semblent peu favorables pour la vie

fortement le risque pour la Terre (voir le sujet: vie extraterrestre). Par ailleurs, comme l’a récemment montré l’étude d’une naine rouge proche (en l’occurrence Proxima du Centaure), ce type d’étoiles est parfois sujet à de brusques instabilités peu favorables à la conservation de la vie, du moins celle que nous connaissons sur Terre. Les naines jaunes sont donc éventuellement plus propices à l’apparition de la vie et elles représentent quand même 10% des étoiles de la Galaxie, soit entre 10 et 40 milliards d’astres… Est-ce suffisant ?

 

De la même façon que les météorites que nous venons d’évoquer sont parfois destructrices, il existe bien d’autres dangers pour une vie biologique fondée sur quelque chose qui ressemble à l’ADN ou autres acides nucléiques : les étoiles géantes, par leurs émissions intenses notamment de rayons ultraviolets, sont évidemment un endroit à éviter. Mais il existe également les sursauts gamma qui détruisent toute vie sur des milliers d’années-lumière, l’explosion d’une supernova un peu trop proche, etc… En somme, l’Univers est hostile et la Terre a peut-être eu de la chance…

 

2. La vie met longtemps à apparaître

 

Il ne faut pas oublier que, sur Terre, la vie a mis plus de quatre milliards d’années pour apparaître, ce qui n’est pas rien. Suivis de trois cent millions d’années avec la domination des dinosaures dont on peut certainement affirmer qu’ils n’auraient jamais réussi à bâtir une civilisation technologique, puis un hasard (un coup de chance ?) avec la chute d’une météorite géante qui a ouvert la voie aux mammifères et donc à l’Homme. Mais encore 65 millions d’années pour en arriver à aujourd’hui…

 

Une fois la vie apparue, il faut donc beaucoup de temps pour atteindre « l’intelligence », c’est-à-dire le niveau technologique suffisant pour communiquer. En revanche, le passage d’une vie primitive à une civilisation technologique est bien plus rapide, trop peut-être. Plusieurs centaines d’années si l’on en juge par notre cas personnel… Ce qui, à l’échelle de l’univers est plus bref qu’un battement de paupière et peut expliquer la difficulté pour que deux civilisations puissent se trouver en phase et communiquer entre elles.

 

 

3. Les aléas d’une civilisation technologique

 

civilisation extraterrestre
existent-ils quelque part dans l'Univers ?

 

Bien des hypothèses peuvent être avancées pour expliquer les raisons pour lesquelles une civilisation avancée ne se manifeste pas.

 

. le facteur temps : nous avons déjà évoqué la disparition d’une civilisation avant qu’elle puisse communiquer par la présence d’éléments extérieurs destructeurs (un pulsar à proximité par exemple) mais il peut également exister un problème de ressources locales : leur épuisement prématuré empêche la civilisation concernée d’aboutir à son minimum technologique.

 

. la civilisation extraterrestre ne souhaite pas communiquer et plusieurs explications sont ici possibles :

 

  • la civilisation extraterrestre a les moyens de communiquer mais elle ne le veut pas par une sorte de peur presque paranoïaque d’une confrontation avec l’inconnu ;

 

  • variante : les ressources disponibles dans l’Univers sont forcément limitées et une civilisation avancée est susceptible d’entrer en conflit avec ses concurrents potentiels (une éventualité développée par Liu Cixin sous le nom de « syndrome de la forêt sombre ») et donc de se mettre en danger ;

 

  • afin de « laisser faire la nature », la civilisation extraterrestre attend que l’autre civilisation atteigne son propre niveau technologique. L’idée ici est qu’une technologie avancée se mérite et ne se « donne » pas à des esprits insuffisamment formés ;

 

  • la civilisation avancée se rend compte que la « poursuite du progrès » suppose un lourd investissement en termes de ressources naturelles, éventuellement de surpopulation, de désordres climatiques, etc. Le bouleversement de son milieu naturel paraît trop important et la civilisation choisit de rester technologiquement modérée ;

 

  • la Terre est une planète banale et peu développée qui n’intéresse pas une civilisation avancée…

 

  • l’exemple que donne notre civilisation technologique ne peut que nous amener à nous interroger sur l’avenir de ce type d’organisation : et si l’état d’avancement d’une civilisation – à supposer que toute civilisation passe par les mêmes étapes qu’on pourrait alors qualifier « d’universelles » - portait en lui-même les germes de son autodestruction ? Un certain nombre de pièges est alors à éviter : armes atomiques, bactériologiques, gaspillage et destruction des ressources…

 

4. la communication est tout simplement impossible

 

L’écoute d’une production extraterrestre est certainement loin d’être aisée : on peut par exemple avancer que les extraterrestres sont si différents de nous que nous ne

civilisations extraterrestres
SETI (Search for Extra-Terrestrial Intelligence)

savons peut-être pas repérer leurs différentes productions. De nombreux organismes, au premier rang desquels, le projet SETI (voir le sujet dédié), sont « à l’écoute », certains depuis de nombreuses années mais sans succès jusqu’à présent : n’y a-t-il rien à écouter ou ne savons nous tout simplement pas le faire ?

 

 Une fois encore rappelons les distances immenses qui nous séparent des éventuelles planètes abritant une vie intelligente : s’il faut beaucoup de temps pour accéder à une technologie avancée, et compte-tenu du fait que les moyens de communications voyagent moins vite que la lumière, il est possible que des émissions aient actuellement lieu mais qui mettront des millénaires pour parvenir dans notre environnement. Idem pour une éventuelle réponse… On se retrouve ici, avec ces distances quasi-infranchissables, dans le cas des voyages interstellaires, à la différence près, il est vrai, qu’une communication n’a pas besoin  de ressources propres pour subsister comme le demande un moyen de transport physique.

 

 

Le paradoxe de Fermi n’est pas résolu

 

Nous écoutons l’Univers depuis à présent plusieurs décennies sans résultats probants. Cela ne décourage pas les scientifiques, conscients que les quelques années « d’écoute » actuelles ne représentent rien par rapport à l’âge de l’Univers et que, d’autre part, les moyens étant limités, ne sont retenus que certains types d’étoiles dans une fenêtre d’observation forcement étroite.

 

D’autres initiatives sont en cours, notamment depuis qu’ont été observées des exoplanètes en nombre croissant : c’et peut-être en obervant la composition de leurs atmosphères (et leur modification non naturelle) que viendra une réponse qui permettrait alors de focaliser tous les moyens dans une direction bien précise. En effet, l’analyse de la lumière qu’émet une planète après avoir absorbé ou réfléchi celle de son étoile donne un spectre lumineux permettant d’analyser les gaz atmosphériques : la présence de méthane, d’oxygène ou d’ozone pourrait trahir l’existence d’organismes vivants. La qualité des outils d’observation progressant sans cesse, c’est peut-être un moyen d’obtenir une réponse au moins partielle…

 

 

Sources ::

 

            * Encyclopaedia Britannica

            * Wikipedia France

            * revue « pour la Science », Hors-Série 120, 0823, 71-78

* École polytechnique fédérale de Lausanne : https://epfl.ch

* futura-sciences.com

 

Images :

1 Enrico Fermi (sources : thefamouspeople.com)

2. la Voie lactée par Serge Brunier

3. soucoupe volante (sources : ici.radio-canada.ca)

4. naine rouge (sources : futura-sciences.com) 

5. vue d'artiste d'une civilisation extraterrestre (sources : futura-sciences.com)

6. le projet SETI (sources : bathtubbulletin.com)

 

Sujets apparentés sur le blog

1. vie extraterrestre (1)

2. vie extraterrstre (2)

3. sursauts gamma

4. planètes extrasolaires

 

Mots-clés : Enrico Fermi - Carl Sagan - ufologie/OVNI - paradoxe du ciel

rouge - civilisation technologique - projet SETI

 

 


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D
Article intéressant. Ma question : on sait qu'il y a des océans profonds sur certaines lunes du système solaire (je pense notamment à Europe). Pensez-vous que des extraterrestres auraient pu s'y installer ? Merci.
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C
En fait, tout dépend des extraterrestres : l'exploration prévue par les scientifiques de ces endroits très spéciaux cherche à mettre en évidence d'éventuelles sources de vie de type bactéries, virus, etc. Si vous faites allusion à des civilisations extraterrestres technologiques, leur présence me semble tout à fait improbable mais sait-on jamais ? Il faudrait imaginer des entités intelligentes qui auraient construit des abris dans ces milieux hostiles mais dans quel but ? Cette hypothèse relève, me semble-t-il, de la science-fiction, toutefois cet avis n'engage que moi...
H
Compte tenu des discussions parfois orageuses entre scientifiques lors du passage de l'astéroïde Oumuamua il y a quelques années (2017) qui par son apparence fusiforme donnait l'impression c'une origine extraterrestre (et puisqu'il venait d'en dehors du système solaire), il y a gros à parier que les chercheurs d'extraterrestres auront du mal à se mettre d'accord sur d'éventuels signes d'existence. À moins que la preuve soit irréfutable et parfaitement déchiffrable. L'étude des atmosphères d'exoplanètes nous promet quant à elle de belles joutes oratoires en perspective !!
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C
Vous avez raison, les débats sur l'origine extraterrestre de telle ou telle donnée seront âpres mais c'est (presque) toujours de cette manière qu'a avancé la science.
J
Les statistiques sont telles qu'il est plus que probable que la vie existe ailleurs, quelque part dans notre galaxie (et a fortiori au sein des milliards d'autres galaxies). Dès lors il semble au fond peu important de rencontrer une civilisation extraterrestre d'autant qu'il n'est pas certain qu'elle soit amicale : la vie sur Terre démontre suffisamment que lorsque deux espèces partagent le même espace vital, il y a toujours une compétition pour les ressources qui, parfois, est redoutable !
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C
Voilà un commentaire qui me semble frapper au coin du bon sens : merci !
C
Des milliards et des milliards de planètes dont un grand nombre est sans doute "habitable" mais par qui ? La Vie telle qu'on la connaît sur Terre a très peu de chance d'être reproduite en l'état : il faudrait une planète identique à la Terre et passée par les mêmes stades évolutifs. Du coup, la Vie (dont la définition varie souvent) n'est peut-être pas encore détectable par nos moyens limités tant elle est différente de ce que l'on pourrait imaginer...
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C
Je suis en accord avec ce que vous écrivez ; la Vie extraterrestre n'est probablement pas comparable à celle existant sur Terre et on aura donc du mal à l'identifier. Toutefois, si une "intelligence" extraterrestre cherchait à communiquer, il me semble que nous devrions en trouver les traces à la condition que ces traces soient temporellement et spatialement compatibles avec nos (maigres) moyens d'observation...
L
Il faut dire que l'espèce humaine - compte tenu de sa médiocrité - ne donne pas tellement envie d'être rencontrée : on comprendrait donc facilement une éventuelle réticence des extraterrestres à nous rendre visite… Excellent article, comme d'habitude.
Répondre
C
Je ne suis pas loin de partager votre avis sur l'expèce humaine !

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