LA RÉALITÉ DÉPASSE LA FICTION
En 1941, le célèbre auteur de science-fiction Isaac Asimov écrivit une nouvelle (complétée dans un livre coécrit avec un autre auteur célèbre Robert Silverberg en 1990) intitulée " NightFall "(- quand reviendront les ténèbres - dans la traduction française). Il y était question d'un peuple vivant sur une planète éclairée par cinq soleils différents et qui ne voyait donc jamais d'obscurité naturelle. Sauf que tous les millénaires survenait un phénomène terrible : une éclipse de tous les soleils en même temps et donc la survenue d'une nuit si redoutée que le chaos s'emparait de la planète...
"Absurde", "impossible", "bien écrit mais invraisemblable" avaient déclaré tous les critiques dits scientifiques de l'époque. Eh bien, un tel système solaire vient d'être découvert par le programme britannique Super Wasp : situé à 250 années-lumière de nous, il renferme effectivement 5 étoiles ce qui est très rare.
Dans ce système baptisé poétiquement 1SWASP JO93010.78+533859.5, existent deux couples de binaires (étoiles doubles), un dit à éclipses (étoiles passant l'une devant l'autre) et l'autre dit à contact car les deux soleils partagent une partie de leur enveloppe externe. Plus une cinquième étoile qui se trouve à 2 milliards de km de la première binaire.
Nos instruments sont encore un peu trop grossiers pour permettre de voir des planètes dans ce système mais les scientifiques pensent que c'est possible, voire hautement probable. On imagine alors sur de telles planètes les différences de durée des jours, les extraordinaires variations de teintes composites de l'atmosphère et la possibilité - rarissime - de voir parfois cinq soleils dans le ciel en même temps et donc l'autre hémisphère plongée dans l'obscurité... ce qui nous renvoie à la nouvelle d'Asimov ! Décidément, les grands esprits ont toujours raison bien avant les autres... et souvent avant les preuves tangibles !
Image : astronomie.skyrock.com
Pour en savoir plus sur les étoiles doubles : étoiles doubles et systèmes multiples
KEPLER 452b
Depuis la fin des années 1990, ce sont plusieurs milliers d'exoplanètes (des planètes tournant autour d'étoiles autres que notre Soleil) qui ont été mises en évidence. La grande majorité sont des planètes gazeuses comme Saturne ou Jupiter, quelques unes telluriques (faites de roches) comme la Terre.
Et puis voilà que la NASA nous apprend qu'elle a découvert une planète presque comme la Terre, c'est à dire susceptible d'abriter une certaine forme de vie... Son nom ? Kepler 452b parce que c'est le télescope spatial Kepler qui l'a mise en évidence.
Kepler 452b ressemble à la Terre en ce sens que comme elle, elle tourne autour d'une naine jaune (étoile de type solaire) un peu plus âgée que le Soleil, donc un peu plus chaude, en 385 jours et qu'elle est située suffisamment à "bonne distance" de son étoile pour qu'une vie de type terrestre puisse s'y développer. Un peu plus grosse que la Terre, elle posséderait effectivement une température "en surface" voisine de la nôtre.
En revanche, impossible d'être certain de la composition de son sol et de savoir si elle possède une atmosphère (indispensable à la protection contre les rayons ultra-violets). Toutefois ce qui nous empêche de penser pouvoir nous y rendre un jour, c'est son éloignement : 1400 années-lumière (il faut donc 1400 ans à une information lumineuse pour nous parvenir de si loin et... autant pour la réponse !). J'ajoute que l'engin le plus rapide jamais lancé par l'Homme, la sonde New Horizons dont nous parlions il y a quelques jours et qui circule à la vitesse de plus de 80 000 km/h, mettrait un peu plus de... 12 MILLIONS d'années pour l'atteindre ! Bref, un rêve inaccessible, mais un rêve tout de même !
Pour en savoir plus sur les conditions nécessaires à l'apparition d'une vie comme la nôtre sur une planète, on peut se référer à deux articles du blog : vie extraterrestre (1 et 2) :
QUI CROIT TOUT SAVOIR, SOUVENT SE TROMPE
Les scientifiques, heureusement et contrairement à d'autres, savent se remettre en question. Tenez, par exemple, le cas des céphéides (qui ont donné son titre au blog), ces étoiles si particulières qu'elles ont révolutionné l'astronomie. En effet, l'américaine Henrietta Leavitt (morte dans l’anonymat alors qu'elle méritait le prix Nobel) avait montré la relation existant entre la période de pulsation de ces étoiles et leur luminosité : du coup, il devenait possible de calculer les distances de tous les objets de l'Univers, galaxies lointaines comprises !
Le chef de file des céphéides est Delta Cephei dans la constellation de Céphée (d'où le nom de ces étoiles); elle a été découverte il y a 230 ans par l'anglais John Goodricke et étudiée sans arrêt depuis, surtout depuis les années 1920 et les travaux de Leavitt.
Étudiée sous tous les angles, on pensait bien tout savoir de cette céphéide emblématique... Faux ! On ignorait (presque) l'essentiel : l'étoile Delta Cephei est double !
Les astronomes suisses et américains qui l'observaient récemment ont, en effet, mis en évidence que la vitesse d'approche de cette étoile vers le Soleil n'est pas constante. Et
la seule explication possible est la présence d'une autre étoile tournant autour d'elle : Delta Cephei, une des étoiles les plus étudiées en astronomie, est une binaire (une étoile double) et on ne le savait pas...
Comme quoi, il ne faut jamais jurer de rien et, surtout, ne jamais considérer les données scientifiques comme définitives et immuables puisqu'il ne s'agit toujours que d'approximations plus ou moins fines. Heureusement, les scientifiques savent se remettre en cause : c'est même grâce à cette faculté qu'on peut dissocier leur empirisme des affirmations définitives de certains faux prophètes.
Pour en savoir plus sur les céphéides et les travaux de Leavitt : les céphéides
Image : delta Cephei (sources : Star-Splitters - WordPress.com et Henrietta Leavitt : wikipedia.org)
LA PLUS ANCIENNE GALAXIE
En mai 2015, des chercheurs américains ont publié la découverte de la plus ancienne galaxie jamais observée par l'Homme : il aura fallu trois télescopes géants pour l'observer et découvrir son âge : 13,1 milliards d'années...
Cela veut dire que cette galaxie, baptisée EGS-zs8-1, est située à 13,1 milliards d'années-lumière de nous (lumière qui voyage, on le rappelle, à la vitesse d'environ 300 000 km/s) ou, dit autrement, qu'on observe une image d'elle comme elle était il y a 13,1 milliards d'années. Or, l'âge estimé de l'Univers est de 13,7 milliards d'années environ. Cela veut dire que l'image captée aujourd'hui s'est formée 650 millions d'années après le Big bang. Et cela interpelle notre modèle de formation de l'Univers précoce.
En effet, la dite-galaxie est massive et très lumineuse, formant des étoiles 80 fois plus rapidement que notre propre galaxie, la Voie lactée. Une chose est donc certaine : dès le début de l'Univers, il existait des galaxies massives, géantes, fourmillant d'étoiles bleues : jusqu'à peu, on avait parié sur de petites galaxies s'agrégeant progressivement au fil du temps. Eh bien non : modèle à revoir ou, plutôt, à compléter...
C'est la raison pour laquelle les astronomes du monde entier attendent avec impatience le lancement dans les années proches du télescope spatial James Webb qui, 100 fois plus puissant que le télescope Hubble (mais dans le domaine de l'infrarouge) permettra d'aller regarder jusqu'à 300 millions d'années après le Big bang et de savoir comment se sont vraiment formées les premières galaxies...
Pour en savoir plus sur les premières galaxies : https://www.cepheides.fr/article-de-l-astronomie-les-premier…
Photo : l'espace profond vu par Hubble en 2010 et fourmillant de galaxies lointaines (sources : www.cepheides.fr)
ZÉTA OPHUICHI, UNE ÉTOILE EN FUITE
Située à 460 années-lumière de la Terre, dans la constellation d'Ophiuchus (dite aussi du Serpentaire), Zéta Ophuichi est une étoile étrange.
D'abord parce que c'est une étoile géante bleue (20 fois la masse solaire), très chaude, dont la luminosité est... 65 000 fois supérieure à celle du Soleil ! Pourtant, on la distingue mal et elle apparaît vaguement rougeâtre car elle est entourée de gaz qui absorbe une grande partie de sa lumière. Sans lui, elle serait une des plus brillantes étoiles du ciel.
C'est surtout sa vitesse qui étonne : 24 km/seconde ! Elle donne l’impression de s'enfuir : les anglo-saxons appellent ces étoiles des "run away star" (étoiles en fuite ou errantes en France). Pourquoi s'échappe-t-elle ainsi comme "jetée par une fronde" ?
Eh bien, c'est que jadis elle faisait partie d'un système binaire : elle était sans doute la compagne d'une étoile encore plus grosse qu'elle. Seulement voilà : en astronomie, plus on est gros, plus on épuise vite son carburant nucléaire et plus on meurt tôt. La compagne de Zéta Ophuichi a explosé en supernova et a "éjecté" sa camarade dans l'espace à l'occasion de cet événement cataclysmique : du coup, cette dernière est devenue une étoile en cavale et le restera... jusqu'à sa mort en supergéante puis supernova dans quelques millions d'années.
Image : l'étoile errante Zéta Ophiuchi est l'étoile bleue presque au centre de la photo, dans le creux qu'elle produit sur le gaz interstellaire en raison de sa grande vitesse (crédits : NASA, JPL-Caltech, Spitzer Space Telescope)
QUATRE QUASARS SINON RIEN !
Les scientifiques viennent de découvrir un système à 4 quasars ce qui est rare au point qu'on pensait que cela ne pouvait pas exister...
Oui mais d'abord, c'est quoi, un quasar ? Eh bien, il s'agit de trous noirs géants qui occupent le centre d'une galaxie. On les appelle ainsi parce que se sont les objets les plus lumineux de l'Univers (quasar = quasi stellar radio source). Ces trous noirs sont des sortes de gouffres gigantesques d'où rien ne peut ressortir, pas même la lumière et, bien sûr, eux, on ne peut les voir mais ce n'est pas le cas de leur environnement formé de matières et de gaz qui, avant d'être "avalés", s'échauffent terriblement d'où l'intense lumière. On dit que certains quasars sont plus lumineux que les centaines de milliards d'étoiles qui composent la galaxie où ils siègent !
Plus on regarde loin dans l'espace, plus on voit des quasars. Or, il faut se rappeler que voir loin dans l'espace, c'est voir dans le passé. Pourquoi les quasars étaient-ils plus brillants lorsque l'Univers était plus jeune ? On pense qu'avec le temps, et après avoir détruit tout ce qui les entourait, eh bien, ils se sont pour la plupart mis en sommeil, faute de "carburant", comme le trou noir central de notre galaxie, Sagittarius A, bien calme depuis longtemps.
On a bien trouvé quelques quasars en "système binaire" (100 sur les 500 000 quasars identifiés) et même deux fois un système ternaire. Mais quatre, c'est la première fois. Par ailleurs, normalement, les quasars les plus proches sont séparés par au moins 100 millions d'années-lumière (al) or ceux dont nous parlons ne sont distants les uns des autres que d'à peine 700 000 al ! Bizarre...
L'immense nuage de gaz et de matière s'étendant sur plus d'un million d'al où ont été aperçus les 4 quasars a été surnommé par les scientifiques la "nébuleuse du Jackpot" : on comprend pourquoi… Mais derrière cet humour un peu forcé se tient une véritable interrogation : comment expliquer la présence de ces quatre quasars si proches les uns des autres et, de surcroît, parfaitement alignés ? On sent que la théorie classique de formation des galaxies et des quasars actuellement en vigueur ne tient pas totalement la route. Ajoutés aux nombreuses anomalies notamment galactiques développées dans le dernier sujet du blog, cette découverte donne à penser qu'il reste bien du travail en perspective...
Pour en savoir plus, voir le sujet : pulsars et quasars ici :
https://www.cepheides.fr/article-25030017.html.
Image : la nébuleuse du Jackpot ; les 4 quasars sont indiqués par des flèches
(crédit : Arrigoni-Battaia & Hennawi / MPIA)
UNE ÉTRANGE ÉTOILE
KIC 8462852 est le nom d’une étoile repérée par le télescope spatial Kepler il y a quelques mois en raison d’anomalies de son cycle lumineux. En effet, à la différence des 150 000 étoiles que l’engin surveille, cette étoile-là présente des variations de luminosité tout à fait atypiques, comme si une énorme masse de matière passait devant elle à intervalles plus ou moins réguliers.
Au début, les scientifiques ont pensé que leurs instruments étaient mal calibrés, puis que leurs relevés étaient faux, victimes d’une quelconque erreur de calcul ou d’observation. Ce n’était pas le cas.
Du coup, quelle pouvait être l’explication du phénomène ? Toutes les hypothèses ont été évoquées : chaos d’une ceinture d’astéroïdes, restes d’une collision récente avec une planète, présence d’un disque de débris géants, nuage de comètes…Mais non, toutes ces hypothèses ont été finalement rejetées. Alors ?
Comme disait Sherlock Holmes : « Quand on a éliminé l’impossible, ce qui reste, aussi improbable que ce soit, doit être la vérité » et les scientifiques d’évoquer alors… une civilisation extra-terrestre, seule à même, semble-t-il, d’expliquer ces obscurcissements (des « transits » selon le terme consacré) aléatoires. Par exemple, on peut imaginer d’immenses panneaux solaires captant la lumière de l’étoile. Bon, il s’agit d’une approche qui relève plus du domaine de la science-fiction que de celui de la « vraie » science mais que des scientifiques sérieux l’envisagent et l’écrivent demeurera plutôt inhabituel !
Reste que l’étoile en question est située à 1480 années-lumière de nous ce qui veut dire que ce que l’on voit actuellement s’est déroulé en l’an de grâce 535 de notre ère. Par ailleurs, une capsule spatiale filant à la vitesse de la lumière (ce qui, par définition, est impossible) mettrait presque 3000 ans à faire l’aller-retour. Tout ça ne fait rien : on peut quand même rêver, non ?
Pour en savoir plus sur les critères nécessaires à une vie extraterrestre : https://cepheides.fr/article-23600657.html
Image : le télescope spatial Kepler (sources : asso-copernic.org)
ÉTOILES CANNIBALES
On a évoqué ici même les galaxies cannibales : abordons aujourd'hui, à une échelle bien plus modeste, les étoiles cannibales. Mais si, ça existe aussi. Pour s'en convaincre, il suffit de rapporter la découverte, il y a quelques mois par la sonde Gaia (agence Spatiale Européenne), d'une binaire, c'est à dire d'un couple d'étoiles, dont l'une cannibalise l'autre.
À 730 années-lumière du Soleil, dans la constellation du Dragon, deux étoiles tournent l'une autour de l'autre. Il y a dans ce couple - baptisé Gaia14aae - une étoile géante (125 fois la taille du Soleil) et une naine blanche. Cette dernière (qui est la résultante de la mort d'une étoile comme le Soleil) est toute petite (à peine la taille de la Terre) mais elle est hyperdense (les scientifiques disent que quelques grammes d'une naine blanche pèsent plus que toute la tour Eiffel). Pour tout dire, la densité de l'étoile géante ne représente que 1% de la densité de la naine blanche...
De ce fait, la naine blanche attire inéluctablement la matière de la géante qu'elle avale lentement. À vrai-dire on connait de tels phénomènes depuis longtemps mais, là, on le voit en direct et parfaitement distinguable car les étoiles sont parfaitement alignées par rapport à la Terre. Si parfaitement alignées que, toutes les 50 minutes, la naine passe devant la géante en une éclipse à répétition. Une aubaine pour l'observation scientifique...
Pourquoi l'attention des scientifiques a-t-elle été attirée par ce couple démoniaque ? Tout simplement parce que, de temps à autre, la naine attire une grande quantité de matière d'où une augmentation soudaine de la luminosité du couple stellaire soudain 5 fois plus brillant. En revanche, les spécialistes ne savent pas comment ce ballet tragique va se terminer : l'explosion de la géante en une supernova ? Une absorption progressive de la plus grosse par la plus petite ? On en saura plus dans quelques millions d'années.
Comprendre les fins de vie stellaire : https://cepheides.fr/article-16856190.html
Image : naine blanche phagocytant sa compagne
(sources : futura-sciences.com/)
mise à jour : 20 mars 2023